Du grand père au Grand Maitre

Au Pré Besson, Popaul dispose d’un livre consacré au Tram, le tramway intra départemental que nous appelions “le Taco”. Plongez vous dans sa lecture, on y trouve tout, les lignes, les gares, le matériel, les horaires et l’iconographie est superbe.
Ce tram a laissé son emprunte nostalgique dans le paysage. Ainsi à Moffans, on peut encore voir la gare et ce que fut la voie : elle empruntait le chemin de la Corne puis passait rue Viney devant chez les Gardent, en allant vers La Vergenne par un chemin vicinal sous le champ des haricots des grands parents.
A Héricourt, le” chemin du tramway”(qui porte encore ce nom) longeait la Lizaine découvrant sur sur la rive opposée, Chevret et l’usine de tissage où officièrent plusieurs de nos ainés (Gustave Vienot, Louis Fleury, Paul et Netty Graff), les cités Chevret, Saint Valbert et les cités Noblot. la gare se trouvait près du bâtiment qui hébergeait le cinéma. Celle de Moffans fut longtemps reconvertie en distillerie municipale, et celle d’Héricourt abrita les scouts laïques après avoir aussi été distillerie.

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Le maillage du réseau était extrêmement dense, il fallait irriguer le maximum de villages d’une sous préfecture à une autre. Ainsi, de Lure à Héricourt, il cheminait de tours en contours si bien que l’amplitude du trajet entre les deux villes était de quatre heures : Saint Georges, Grange le Bourg, Saulnot, Champey et Couthenans etc. A vélo avec Roland, nous mettions 1 h 15 entre ces deux villes, mais nous prenions au plus court, par les bois de Vaux.

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La construction du Tram en Haute Saône débutât vers 1878 et son exploitation pris fin en 1938. la ligne reliant Lure à Héricourt (43 km) fut construite en 1906 financé par le baron Empain, comme l’ensemble du réseau. Le petit train intra départemental, dit le chemin de fer vicinal, fut progressivement remplacé par les transports Citroën.

A Moffans l’arrivée du car de 19 h, en provenance de Lure et en direction d’Héricourt, ressemblait à l’arrivée de la diligence telle qu’on pouvait la voir dans certains western, elle attirait les regards curieux. Alors que sonnait l’angélus, on entendait le car gravir poussivement la côte de l’église, le changement de vitesses craquant dans le dernier virage, et il s’arrêtait devant chez Sire, le bistrot, à la terrasse duquel les frères Simonin dégustaient le pastis en s’esclaffant de rires sonores. Nous, les Jobert, regardions descendre les voyageurs depuis le banc sous le tilleul où nous goutions la fraîcheur du soir naissant.

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Je ne vous raconterai pas l’arrivée du tram, je ne l’ai pas connu et le grand père ne m’en a jamais parlé, ni d’autres choses d’ailleurs, peut être avec Roland, son petit fils préféré. Pourtant, après avoir été cantonnier, il fut cheminot et travailla à la vie de ce chemin de fer. L’ouvrage que possède Popaul reproduit une photo d’un groupe devant la locomotive, le Grand Père Octave est assis sur le butoir avant, c’est le plus flou, mais on distingue bien sa silhouette taciturne.

Pépé et la photo du tacot

En feuilletant plus profondément ce livre, on découvre que le village de Molay fut un carrefour ferroviaire départemental. Molay me dis-je c’est le nom du dernier Grand Maitre des Templiers, sans doute le village dont il est originaire.
Jacques de Molay, comme son nom l’indique était né à Molay de petite noblesse, sa maison natale était un petit château médiéval. J’avais passé pas mal de temps avec Audinot à traquer des ruines et souterrains templiers, ma curiosité à ce sujet se réactivât donc en l’occasion.

La lecture du roman historique “Les rois maudits” commence par la chute des dignitaires de l’ordre du Temple, et plus particulièrement par l’incinération de Jacques de Molay, le dernier grand Maître, sur l’ile aux juifs. Cette ile fut rattachée à celle de la cité, sous Henri IV, lors de la construction du Pont Neuf. Les galipettes du béarnais ont justifié le nom de Vert Galant.

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D’après l’auteur, quelques instants avant d’être attaché sur le bûcher, Jacques de Molay prononça la fameuse malédiction sur la tête de Philippe IV le Bel et sur sa descendance Capétienne, sur le Pape Clément V et sur le ministre persécuteur des templiers, Guillaume de Nogaret :
!”Pape Clément ! Roi Philippe ! Chevalier Guillaume !Avant un an, je vous cite à paraître au tribunal de Dieu pour y recevoir votre juste châtiment ! Maudits ! Maudits ! Tous maudits jusqu’à la treizième génération de vos races “

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Philippe Le Bel regretta de ne pas lui avoir fait couper la langue avant de le brûler, mais tous , le Pape, le Roi, le Ministre moururent dans les mois qui suivirent. Et tous les fils descendant de Philippe IV eurent un règne assez court, interrompu par une mort brutale.

Cette Saga historique fit l’objet de deux adaptations télévisuelles :
– Une magnifique adaptation de Claude Barma en 1972. Jacques de Molay y apparait décharné après plusieurs années de cellules, de privations et de tortures, interprété par Xavier Depraz.
– Une seconde adaptation en 2005 par Josée Dayan, genre série française poussive avec un trop plein d’acteurs à la mode. Jacques de Molay y apparait gros et gras, suiffeux, interprété par le suintant Gérard Depardieu.

Donc, Jacques de Molay, venait du village de Molay. Et en consultant les parcours et les horaires du Tram, j’y découvris une carte postale de ce village, avec une photographie du château de l’ancien grand maitre, détruit par un incendie au début du 20e siècle. Je profitais donc d’un déplacement avec Alan pour visiter notre chère Bobette à l’hôpital de Belfort, et au retour nous nous arrêtions à Molay, afin de voir cette bâtisse ou ce qu’il en restait.

J’interrogeais les habitants que je croisais dans la rue, la plupart ignorant de quoi et de qui je parlais. Survint alors une vieille dame tirant charrette, vêtue à l’ancienne d’une robe noire à fleurs et d’un tablier ad hoc,  me rappelant la sorcière du village, genre la Coulise à Chagey, dont peut être certains de vous ont gardé le souvenir.

“Mais c’est chez moi s’écria t’elle ! ” ! Nous la suivîmes et elle nous désigna un appentis en ruine au toit bancal apposé sur un grand et élevé mur ancien dans lequel était entreposé des buches. “Voilà me dit elle c’est tout ce qu’il en reste, j’y mets mon bois à brûler”.

maison de jacques de molay
Après la malédiction de Jacques de Molay lancée à l’encontre de Philippe IV le bel, je me demande si ce roi de France n’aurait aussi maudit et voué secrètement le Grand Maitre du Temple à un bucher perpétuel.

Templiers

2 réflexions sur “Du grand père au Grand Maitre

  1. La notion de 13 générations est assez vaste, car certains considèrent la décolation de Louis Capet dit le XVIÈME comme la fin de la malédiction de Jacques de Moley. Ceci enferme donc les règnes des Louis n°14 et 15 dans l’échantillon et ce sont les 2 plus longs règnes de l’histoire.

    • La légende, plus que l’histoire veut que lors du guillotinage du gros Louis dernier du nom, un homme vêtu d’une tunique à croix pâtée se serait exprimé : Jacques de Molay est vengé. Faisons nous plaisir, j’aime que la légende et l’histoire se confondent à n’en plus faire qu’une.
      Les grands historiens qui furent les nègres de l’auteur des rois maudits ont fait une faute : Guillaume de Nogaret était déjà mort lors de la malédiction. Si on maintient cette dernière, il s’agirait alors d’un autre Guillaume, un chevalier qui participa à la rafle anti templiers.
      N’empêche que c’est bien fait pour Philippe le Bel !

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